LGV Bordeaux-Toulouse-Dax : une note de Bercy inquiète les partisans de la grande vitesse
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23 juin 2025 - Sud-Ouest

LGV Bordeaux-Toulouse-Dax : une note de Bercy inquiète les partisans de la grande vitesse

Les travaux ont commencé sur les voies existantes au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse. Mais le financement du tronçon de ligne nouvelle entre les deux métropoles n’est pas encore sécurisé.© Crédit photo : Laurent Theillet/SO

Les grands projets ferroviaires peuvent-ils être étalés dans le temps ou abandonnés ? C’est un scénario envisagé dans les ministères qui cherchent à faire des économies budgétaires

Austérité oblige, la France va devoir amputer son budget à grands coups de tronçonneuse. Le Contrôle général économique et financier (CGefi), sorte de Cour des comptes interne à Bercy chargée de veiller sur les dépenses des organismes publics, a adressé une note le 13 mai 2025 aux directeurs de cabinet des ministres de l’Économie et des Comptes publics.Ce document interne a été intercepté début juin par « L’Humanité ». Dans cette notice de huit pages, la ministre Amélie de Montchalin annote la « recherche de gisements d’économies budgétaires ». Redécouper les services, les fusionner, les dégraisser, etc.

Un chapitre évoque des coupes budgétaires du côté du rail. Première piste : « Étaler dans le temps les grands projets ». La note vise explicitement deux programmes de lignes nouvelles à grande vitesse : LNPCA (Marseille-Nice) et GPSO (Bordeaux-Toulouse-Dax),rebaptisé récemment LNSO : « Il serait peut-être envisageable de réexaminer ces deux projets qui représentent un budget de 3,6 Mds€ et 14 Mds€, dont la moitié est à la charge de l’État (40 % en réalité, NDLR) », suggèrent les auteurs.

La crainte a changé de camp

La note interne « n’a aucune valeur d’arbitrage », freine le ministère des Comptes publics, contacté par « Sud Ouest » cette semaine. Mais elle fait planer une menace sur le financement du projet. Il y a quelques jours déjà, dans nos colonnes, un membre du gouvernement doutait sur la capacité de l’État à financer les nouvelles lignes entre Bordeaux, Toulouse et Dax :« Il n’y a plus d’argent dans les caisses. »

La crainte a gagné le camp des pro-LGV. Pas au point de rassurer les opposants qui savent que ce dossier ressemble à un balancier d’horloge

Du côté de Toulouse, les pro-LGV ont haussé le tondans « La Dépêche du Midi ».À l’image de la présidente de la région Occitanie Carole Delga : « Tout est prêt : les premiers travaux sont déjà lancés. Et l’on voudrait tout remettre en cause dans une pure logique comptable. » Même coup de corne du côté du maire de Toulouse Jean-Luc Moudenc : « L’État ne peut pas piétiner ses engagements. »

La crainte a gagné le camp des pro-LGV. Pas au point de rassurer les opposants qui savent que ce dossier ressemble à un balancier d’horloge. Le président Macron avait par exemple enterré le projet en 2017 avant de le remettre sur les rails suite à l’arrivée de Jean Castex à Matignon en 2020. Malgré ces louvoiements, les travaux ont commencé sur les voies existantes, au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse.

Qui va payer ?

Les difficultés budgétaires de l’État et les préconisations de Bercy ont de quoi semer le doute. Des pistes de nouveaux financements pérennes des infrastructures ferroviaires vont devoir être trouvées pour éviter l’enlisement. En cas d’échec, le chantier de la nouvelle ligne Bordeaux-Toulouse, programmé en théorie entre 2026 et 2032, risque de prendre du retard ou, au pire, être abandonné. Au final, les arbitrages se feront à Matignon.

En attendant d’y voir plus clair,la Région Nouvelle-Aquitaine avance l’argent à l’État. De quoi nourrir les craintes des anti-LGV sur les répercussions pour les contribuables du Sud-Ouest : « Si l’État ou l’Europe se désengagent, ce sont les collectivités locales qui devront prendre le relais », préviennent-ils.